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Nous allions alors essayer de rattraper le retard accumulé notamment sur nos voisins français et britanniques, qui avaient une longueur d'avance sur nous, respectivement grâce à l'action du CLEMI et du BFI.
Le Conseil de l'Éducation aux Médias (CEM), puis le Conseil Supérieur (CSEM), allaient être ensuite à la manœuvre pour encadrer l'introduction de l'EAM dans nos écoles et, à partir de 2008, dans le secteur associatif.
Trente ans se sont ainsi écoulés depuis les premiers balbutiements de l'EAM chez nous. Trente ans qui furent consacrés à se forger un cadre de référence, des textes fondateurs, des activités emblématiques, comme OMQ, l'appel à projets, la journée des H.E.
Le CEM, le CSEM, les trois centres de ressources et les partenaires comme l'AJP, La Presse.be, la RTBF, les Grignoux, ont globalement « bien travaillé » ou, en tout cas, ils ont fait pour le mieux avec les moyens qui leur ont été octroyés ... Mais qu'en est-il de l'éducation aux médias sur le terrain ? Qu'en est-il de l'EAM dans les comportements des jeunes, de leurs formateurs, dans la mentalité du citoyen ?
Notre sentiment est qu'après trente ans, il ne nous semble pas normal qu'une telle disparité continue d’accompagner la mise en œuvre quotidienne de l'EAM. Cette disparité, elle existe déjà dans la perception même du concept et de ses objectifs. On la retrouve dans son interprétation au plan opérationnel. Elle est de nouveau présente dans les dispositifs de formation initiale et continuée, où l'on passe d'une intégration efficace à une absence totale. Mais là où cette disparité saute aux yeux, c'est dans les pratiques de terrain, dans les activités de la classe ou de la maison des jeunes. Et ce constat ne pourrait être autre, car il résulte d'un ensemble de lacunes en amont, mais aussi d'une trop grande disparité de traitement de l'EAM, dans le chef des réseaux, des P.O., des institutions et des acteurs eux-mêmes.
Dans d'autres interventions, nous avons eu l'occasion de pointer un certain nombre de dysfonctionnements d'ordre structurel ou conjoncturel. À côté de certaines dérives technicistes ou de tentations vers le « tout-numérique », il y a aussi cette nébuleuse que représentent pour beaucoup les médias aujourd'hui et, par conséquent, leur éducation. L'hybridation des médias n'est pas un facteur étranger à la confusion, une hybridation de technique ou de contenu.
Quoi qu'il en soit, il ne nous appartient pas de nous livrer à une telle évaluation ; celle-ci doit être scientifique et externe. Il serait ici exclu d'être à la fois juge et partie. Nous avons chacun nos propres représentations de l'éducation et des médias, nos propres attentes, nos filtres, nos biais cognitifs ...
Si cet état des lieux et l'évaluation qui doit s'ensuivre ne sont pas effectués rapidement, nous risquons de tourner en rond, de nous essouffler inutilement avec ce danger supplémentaire d'une sorte de fuite en avant consistant, par exemple, à vouloir prendre à bras-le-corps des problèmes comme la pornographie ou le radicalisme, dont l'ampleur sociétale nous échappe. Il nous semble, par contre, essentiel de nous recentrer sur nos fondamentaux, devant l'urgence des enjeux éducatifs actuels, sachant aussi que la crise que nous traversons exige de notre part d'accorder notre priorité à une information claire, validée, indépendante et pertinente. Nous pensons que c'est aussi ce que tout citoyen attend aujourd'hui de l'éducation aux médias.
Et dans cette optique, nous aimerions clôturer cet édito en évoquant ce texte engagé et ambitieux que fut la Déclaration de Bruxelles en 2008. Cette Déclaration suscita à l'époque l'adhésion massive de pédagogues ou de représentants de la classe politique. Elle préconisait, en effet, une éducation aux médias « tout au long de la vie », la seule option qui ouvre l'EAM à tous les publics, quelle que soit leur appartenance culturelle ou socio-économique. Malheureusement, cette belle déclaration n'a jamais été évaluée dans ses effets. Et il y a fort à parier que ce n'est pas avec moins d'un euro par citoyen de la Fédération Wallonie-Bruxelles que son objectif avait quelque chance d'être atteint ...
En tout cas, si nous ne nous livrons pas d'urgence à une évaluation de notre politique d'éducation aux médias, elle se transformera une fois encore en un catalogue de bonnes intentions ou d'actions contre-productives.
Michel Clarembeaux
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Semaine mondiale de l'éducation aux médias et à l'information
La Conférence générale de l'UNESCO ferait-elle un clin d’œil au « Pôle liégeois d'éducation aux médias et à l'information » ?! Elle vient, en tout cas, de proclamer cette dernière semaine d'octobre 2020 Semaine mondiale de l'éducation aux médias et à l'information. Vient ensuite une longue argumentation sur l'importance de l'EMI, comme étant « un impératif essentiel à l'ère numérique », « une question de vie ou de mort » dans la crise actuelle, « une dimensions essentielle de la manière dont l'éducation peut être repensée dans un monde complexe ».
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Prochain tiré-à-part de notre médiathèque spécialisée en EMI consacré à l'Information de qualité
Nous apportons notre modeste participation à cette Semaine en annonçant la prochaine sortie du tiré-à-part de notre médiathèque spécialisée en EMI. Ce document est consacré à l'Information de qualité ; il comporte les références et abstracts d'une cinquantaine d'ouvrages récents (2015-2020) portant sur la thématique et disponibles au CAV Liège.
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